Surtout, ils ont continué à affûter leurs regards sur le monde grâce aux “écrans de la réalité” au cinéma de Douai, après un travail déjà entamé dans leurs établissements autour de l’éducation aux médias.

Lors de ce Festival International du Grand Reportage et du Film documentaire d’actualité, ces 10 représentants, venus de Dunkerque, Montreuil-sur-mer, Abbeville, Château-Thierry, Dourges, Douai, Saint-Amand, Laon et Valenciennes, ont vécu un moment riche en rencontres humaines, en découvertes fortes et sensibles et en discussions collectives.

Cinq jours intenses de découvertes souvent bouleversantes. Les élèves ont été émus par l’histoire tragique de Marc Marginedas, un journaliste otage de Daech, racontée sobrement dans le film “Retour à Raqqa” de Robert Solé, qui mêle témoignages, images de propagande et séquences d’animation. Les élèves ont ainsi choisi de distinguer ce film, faisant sans le savoir le même choix que le Jury des professionnels.

Autre rencontre inoubliable avec Elaha Iqbali, une jeune fille de leur âge, future journaliste et réfugiée afghane vivant aujourd’hui en Allemagne. Son parcours est superbement mis en images par Manon Loizeaux dans son film “La vie devant elle”. Le service public et son site France.tv nous permettent de le revoir.

Je retiens de ces cinq jours la force des histoires vues. Le courage impressionnant des femmes et des hommes rencontrés, aussi bien les reporters, les journalistes, les réalisateurs que les humains dont les vies nous étaient racontées. Des visages, des noms, des lieux d’Europe et du monde imbriqués. Des paroles puissantes, des moments inquiétants. Des problèmes multiples évoqués autour des guerres, des conflits d’intérêt, de la cupidité et des menaces pour nos démocraties et les biens communs.

Ces documentaires mettent la caméra dans les plaies de nos sociétés et nous invitent à ne pas rester ignorants, dans le déni ou désinformés. Les élèves ont dit plusieurs fois “s’être pris une claque”. Ensemble, nous avons exprimé nos émotions et partagé nos questions pour essayer de comprendre des situations complexes et donc intéressantes. Nous avons apprécié la sobriété, le rythme, les témoignages, les enquêtes et la variété des dispositifs dans chacun des films.

Des solutions pour l’avenir existent bien sûr et les 19 films vus les évoquent souvent aussi. Ils participent à illustrer, défendre et protéger des valeurs vitales comme la liberté de la presse, la liberté d’expression, l’égalité entre tous, le respect des droits humains, la justice, la démocratie.

L’intelligence collective et la sensibilité de ces jeunes aux films documentaires ont été extraordinaires.  Au-delà de ce que nous avions imaginé. La qualité de leurs échanges au quotidien, entre les projections, lors des déplacements à pied, des repas ou le soir. Leur capacité à réfléchir, argumenter, débattre et délibérer entre pairs. En autonomie, ils ont écrit le texte du discours qu’ils ont prononcé lors de la remise du prix du Jury Jeunes.

Des rencontres intenses finalement pour eux, après la remise du prix, avec des réalisatrices et réalisateurs. La fraternité construite entre ces jeunes de notre Région des Hauts-de-France durant ces cinq jours.

Ces jeunes filles et garçons de 16 à 19 ans ne se connaissaient pas, mais ils ont partagé une expérience humaine concrète qui élève, autour d’un festival ambitieux, mais abordable. Ensemble, ils ont représenté les jeunes citoyens de demain. Ensemble, ils et elles sont devenues de meilleures personnes, mieux informées et mieux éclairées.

Jérôme Canny, professeur de Lettres-Histoire-Géographie au lycée professionnel Julie-Daubié à Laon