Rencontre avec un juré passionné, qui vit les mêmes émotions que ses jeunes concurrents.
Sa moustache rousse finement taillée et sa paire de bretelles sont bien connues dans les coulisses des Olympiades des métiers… Dix ans, déjà, que le professeur d’ébénisterie d’art au lycée des Métiers de l’ameublement de Saint-Quentin (02) s’engage pour le plus grand concours réservé aux professionnels de moins de 23 ans. Un engagement de tous les instants, qui commence bien avant les sélections régionales et dont le cycle se termine avec la compétition internationale organisée par WorldSkills, programmée tous les deux ans.
Être juré, un devoir de transmission
« Chaque olympiade réserve son lot d’épreuves, difficiles et très rythmées, qui demandent beaucoup d’application et une maîtrise parfaite des gestes. Le ou la concurrent(e) doit faire preuve d’une qualité de travail irréprochable et un très haut degré de maturité. Pour réussir, il ou elle devra travailler dur et maîtriser trois registres fondamentaux : la technique, le physique et le mental. Exactement comme dans la vie professionnelle, explique le juré. C’est ce degré d’exigence et d’excellence qui me motive. Les Olympiades des métiers, c’est un concours unique qui m’a happé, comme l’ébénisterie lors de mes jeunes années, puis l’enseignement. C’est plus qu’une passion : c’est une vraie vocation. »
Information à ne pas oublier : Jean-Claude Lallement, comme tous les jurées et jurés mobilisés pour le concours, est bénévole ! Autant dire que leur participation n’est animée que par des sentiments louables, au service des jeunes. D’ailleurs, Jean-Claude ne compte plus les heures qu’il consacre à chaque épreuve. Pourquoi ? « Tout simplement parce que le concours permet de révéler des talents, mais aussi de faire perdurer un savoir-faire, des techniques représentatives de l’artisanat français, révèle-t-il. Nous avons, nous les jurés, un vrai devoir de transmission. »
Top départ pour un nouveau cycle
Mars 2018, top départ pour un nouveau cycle pour Jean-Claude Lallement. D’abord les sélections régionales, organisées par la Région du 19 au 24 mars, la première étape d’une compétition qui mobilisera l’enseignant jusqu’aux WorldSkills, organisées en 2020 à Shanghai (Chine) ou Bâle (Suisse). Quelques semaines avant les épreuves, Jean-Claude et les jurés de la France entière recevaient le sujet de la sélection « Ébénisterie ». Cette année, les concurrents doivent réaliser un écritoire en chêne. « Une pièce d’une grande finesse, comme vous n’en trouverez jamais dans le commerce… Les ébénistes sont de vrais artistes. Leur métier est d’ailleurs recensé comme l’un des 217 métiers d’art de France. »
Penché sur un établi, Jean-Claude Lallement se plaît à relire pour la centième fois les cotes de l’œuvre à réaliser par les finalistes de la nouvelle édition des sélections régionales. L’enseignant s’amuse à relever les embûches de l’épreuve du jour. Ici, un dessus abattant qui devra être réalisé à la perfection. Là, un petit casier coulissant amovible qui, à coup sûr, va donner du fil à retordre aux apprentis ébénistes. Quant à l’essence utilisée, le chêne, elle reste classique mais demande un geste précis et sûr. Seuls les plus aguerris auront une chance de passer l’examen minutieux à l’extrême du juré saint-quentinois…
Bravo à Quentin Theraud !
L’épreuve d’ébénisterie, organisée les 21 et 22 mars 2018 à Amiens, a tenu en haleine les concurrents pendant 17 heures ! Jean-Claude et ses collègues jurés ont scruté dans les moindres détails les œuvres réalisées : le choix des matériaux, le tracé les pièces, les assemblages, la finition… Au final, c’est Quentin Theraud qui a emporté les faveurs du jury, pour un écritoire « fin, précis, très bien maîtrisé. » Un champion venu de Nouvion (80) que Jean-Claude Lallement connaît : il est l’un de ses élèves au lycée des métiers de l’ameublement !
« Ce n’est que le début de l’aventure des Olympiades, pour lui comme pour moi, avance le juré. Je vais bientôt le convier à une semaine de préparation physique et mentale à Saint-Quentin, pour qu’il comprenne exactement ce que j’attends de lui, la rigueur qu’il va devoir adopter. Je vais le coacher comme un sportif de haut-niveau. Au fil des semaines, nous allons préparer intensément les finales nationales, organisées à Caen du 28 novembre au 1er décembre 2018. Le compte à rebours est lancé ! »
Et le marathon des Olympiades ne sera pas encore fini pour Jean-Claude… « À l’issue des finales nationales, le champion français – j’espère que ce sera Quentin ! – va venir se former dans notre lycée qui est certifié Centre d’excellence, à Saint-Quentin. Ensemble, nous allons vivre, manger, respirer Olympiades ! Et ce sera enfin, à l’issue de cette préparation très intense qui durera plusieurs mois, la délivrance : la compétition mondiale WorldSkills. La consécration pour le jeune finaliste français en ébénisterie et, bien sûr,… pour moi ! » L’implication, totale et sans retenue, de Jean-Claude Lallement fait tous les deux ans ses preuves. En cinq Olympiades, ses champions ont toujours fini dans le top 10 mondial. Sa nouvelle ambition : conquérir le Graal, la place du champion du monde ! Le rendez-vous est pris pour Kazan en 2018 et Shanghai ou Bâle en 2020.